Bonjour les balcon-jardiniers et bienvenue sur mon-balcon-jardin.com. Aujourd’hui, j’ai le grand plaisir d’accueillir avec moi Maïlys Dorn du blog Optimise mon Espace. Maïlys est architecte d’intérieur et a une approche très innovante et originale de son métier. Vous vous demanderez peut-être ce que cela a à voir avec l’aménagement de balcons, de terrasses ou de jardin. Mais dans toutes mes recherches, j’ai constaté qu’il y avait beaucoup de parallèles entre l’aménagement d’espaces intérieurs et des espaces extérieurs.

C’est pour cela que j’ai demandé à Maïlys de discuter avec moi de sa vision de l’aménagement d’espace.

Valérie : Bonjour Maïlys et merci d’être avec moi aujourd’hui. Ai-je oublié quelque chose d’important ?

Maïlys Dorn : C’est parfait ! Merci Valérie pour ton invitation que j’apprécie. Je suis tout à fait d’accord avec ton approche. L’intérieur et l’extérieur sont intimement liés.

Valérie : Un sujet revient souvent chez toi, celui de l’architecture d’intérieur pertinente. Je pense qu’on peut très bien faire du paysagisme pertinent aussi. Qu’est ce que cela veut dire pour toi l’architecture d’intérieur pertinente ?

Maïlys Dorn : L’architecture d’intérieur pertinente repose sur 4 piliers. D’abord le sur-mesure avec une approche qui va remettre l’habitant au cœur du projet. Ce n’est plus simplement une approche esthétique. On se demande plutôt « Pour qui dessine-t-on cette maison ?», « Qui va habiter là ?», « Qui va-t-on faire cohabiter en harmonie ?» Une maison n’est pas faite pour une seule personne, généralement plusieurs personnes vont vivre dedans. On se demande donc qui sont toutes ces personnes et comment vont-elles faire pour cohabiter en harmonie. Tout cela représente le pilier du sur mesure.

Le deuxième pilier est celui du durable. Cela veut dire prendre soin de la terre mais aussi de sa santé. Nos intérieurs sont aujourd’hui malheureusement plus pollués que l’air extérieur. Le pilier du durable, c’est aussi comment être pertinent au niveau de son approche quand on fait un chantier de rénovation puisque le secteur du bâtiment est l’un des secteurs les plus polluants.

Le troisième pilier, c’est le pilier du rentable. Quand on construit ou rénove une maison, cela représente des milliers, des dizaines de milliers ou même des centaines de milliers d’euros investis. Il faut donc un retour sur investissement. L’objectif n’est donc pas seulement de faire du beau mais de faire quelque chose où on se sent bien et où il y a une rentabilité pour soi-même, pour la revente ou pour un investissement locatif. Pour soi-même, on ne va pas seulement penser à nos besoins maintenant, mais aussi à nos besoins à moyen et long terme. Si je prévois par exemple de déménager dans quelques années pour trouver plus grand, comment puis-je faire pour ne pas déménager justement et anticiper comment je pourrais avoir une pièce en plus dans le même espace ?

Le quatrième et dernier pilier est celui du partage. Je suis très friande du partage de connaissances et de compétences. L’habitat pertinent, c’est cela aussi. Nous ne travaillons pas seuls dans notre coin. Nous sommes plusieurs professionnels de l’habitat pertinent à échanger nos expertises notamment lors du Homer Day. Le Homer Day est LE séminaire de l’habitat pertinent qui a lieu normalement chaque année au mois de Janvier à Bordeaux. Mais c’est aussi l’approche du réseau des « Homers » qui regroupent les professionnels formés à la méthodologie « H.O.M.E » dans l’atelier H.O.M.E et dans le programme de formation de l’école H.O.M.E que j’ai fondée.

Un Homer est quelqu’un qui a cette approche-là de l’architecture pertinente et qui travaille avec une méthode d’optimisation de l’espace spécialisée dans l’habitat et qui remet particulièrement l’habitant au cœur du projet.

Valérie : Il y beaucoup d’aspects dans ce que tu viens de dire qui se retrouvent quand on veut aménager un espace extérieur. Tu viens aussi de nous parler d’une méthode. En quoi consiste-t-elle ?

Maïlys Dorn : Il s’agit d’une méthode que j’appelle « méthode en entonnoir ». On part d’un projet qui est très flou tout en haut de l’entonnoir. Tout en bas de l’entonnoir, à la fin, on arrive à un projet très précis. Tout au long de l’étude, on va élaguer toutes les questions, toutes les remises en question qui pourraient avoir lieu au moment du chantier ou pire après le chantier. On va passer beaucoup de temps à approfondir l’étude des besoins dans le cahier Home qui correspond au cahier des charges.

Il s’agit de 10 questions à se poser pour réussir son projet (un guide est téléchargeable gratuitement sur le site Optimise mon Espace). Ces 10 questions permettent de bien prendre en compte tous les paramètres pour étudier son projet en fonction de ses besoins d’aujourd’hui, de demain et d’après-demain ainsi que de ses besoins à soi et ceux de ses cohabitants.

Il est urgent de prendre son temps et de se poser les bonnes questions pour ne pas regretter de ne pas se les avoir posées en amont. (Dans cet article, vous en apprendrez plus sur la planification de l’espace sur votre balcon).

Valérie : comment fais-tu pour tirer ces informations de tes clients, pour les faire se poser les bonnes questions et trouver les réponses ?

Maïlys Dorn : c’est justement tout l’enjeu du métier de Homer. C’est un aussi une approche psychologique finalement. A la base, le client ne va même pas nous transmettre 10% de ses besoins. L’idée de ce cahier est donc de l’inviter à se poser des questions qu’il ne se serait pas posées lui-même pour pouvoir trouver des réponses ensemble. Parfois, on a des petits éléments de réponse qui nous amènent à leur poser des questions supplémentaires.

Il y a parfois des questions qu’on n’ose pas se poser parce que cela peut être gênant. Nous, nous n’allons pas être gênés !

Valérie : c’est le point de vue de l’observateur extérieur, neutre.

Maïlys Dorn : Oui, neutre mais impliqué !

On va se mettre dans l’intimité de la famille, observer les rapports entre les cohabitants. Il y a parfois des tensions entre parents et enfants, entre mère et fille, entre frères et sœurs… On va essayer de comprendre d’où viennent ces tensions. Il y a souvent un lien avec la façon dont est conçue la maison, dont on va circuler, dont elle est organisée et agencée.

Valérie : Tu as dit au début qu’un espace réussi n’est pas seulement un espace beau à regarder mais aussi un espace pratique…

Maïlys  Dorn : oui, que ce soit l’intérieur ou dans un jardin, les deux ont la même problématique. Il faut savoir « zoner ». Dans un jardin, ce qui est sympa, ce n’est pas d’avoir la même chose partout. Il faut un coin pour lire, un coin pour faire de la balançoire, pour jouer au ballon, un coin pour la piscine, pour le transat, pour potager. Même pour un jardin qui n’est pas trop grand, s’il y a plusieurs zones, cela va l’agrandir car on aura l’impression d’avoir plusieurs fonctions.

Et même, je dirais que plus l’espace est petit, et plus il est important de zoner. Nous avons habité dans un petit studio de 25m² à 4. Mais l’espace avait l’air grand car il était très bien zoné, notamment avec l’aide de la lumière. La lumière aide énormément à zoner les espaces. Dans le coin pour lire, ce n’est pas la même lumière que le coin pour manger, cuisiner ou pour travailler. (Allez voir aussi cet article sur l’aménagement d’un balcon tout en longueur).

C’est similaire à ce qu’on peut faire dans un jardin. Ce qui est important entre le jardin et la maison, c’est la vue qu’on a depuis la maison. Au Japon, on appelle ça les « shakkei », les emprunts de paysage. On va dessiner la fenêtre en fonction de la vue qu’on veut avoir. Si on veut voir un bel arbre, on va dessiner une fenêtre pour avoir la vue sur cet arbre et pas sur le bâtiment à côté. C’est intéressant. C’est une approche qu’on n’a pas en France. Nous avons plutôt cette culture d’avoir les fenêtres alignées sur la façade. On ne prend pas en compte ce qu’on va voir depuis l’intérieur, mais plutôt à quoi ressemble le bâtiment depuis l’extérieur.

Ce qui m’intéresse en tant qu’architecte d’intérieur c’est ce rapport entre l’intérieur et l’extérieur. Pour bien profiter de son intérieur, il faut savoir ce qu’on va voir depuis l’intérieur, comment on va percevoir cet extérieur depuis notre intérieur.

Ce qui est sympa aussi, ce sont les esprits patios avec le jardin à l’intérieur de la maison. On peut confondre ces zones et se dire que le jardin est une pièce de la maison. Il y au Japon ce qu’on appelle l’engawa qui fait tout le tour de la maison, comme une coursive. C’est un grand balcon qui est aussi une zone tampon et qui l’été agrandit l’espace de la maison. C’est au même niveau de plancher que le salon. On ouvre en grand et on floute la frontière en l’intérieur et l’extérieur. Et c’est également ce qui m’intéresse aussi, c’est de flouter cette frontière entre le dedans et le dehors.

Valérie : as-tu toi-même un jardin, un balcon ou une terrasse ? Et qu’est-ce que cela signifie pour toi ?

Maïlys Dorn : aujourd’hui, j’habite dans un appartement, dans une grande copropriété. J’ai deux balcons qui me servent assez peu car ils sont très étroits. Par contre, j’ai un grand jardin qui est très sympa pour les enfants parce qu’ils y voient tous leurs copains qui sont des voisins. Donc il y a tout cet esprit de jardin de jeu de copropriété.

En revanche, je suis en train de concevoir un projet de construction de maison. Il s’agit d’un projet sur un terrain en très forte pente avec très peu de jardin plat. Il n’y a même pas de plat du tout. Tout l’enjeu est donc de créer des petites zones de jardin. Il y aura une partie toit plat, pour créer un jardin sur le toit. Et il y aura un patio qui séparera la partie travail, les bureaux, de la partie maison puisque mon mari comme moi travaillons tous les deux depuis la maison. Ce sera de plus en plus monnaie courante d’avoir les bureaux à la maison. L’idée, c’est de séparer, avec ce petit jardin d’hiver intérieur, qui sera un jardin couvert, la maison de la partie travail. Donc cela fait partie du projet : ce petit jardin sur le toit, une grande terrasse, et puis un patio.

Ce que j’aurais bien aimé mais je ne sais pas encore comment on va l’inclure dans ce projet, au Québec ils font des serres d’abondance. Il s’agit d’une prolongation du toit en verre, dans laquelle on peut faire pousser des légumes, des fruits, en permaculture. Cela fait une pièce jardin comme un jardin d’hiver. Mais l’été cela permet aussi de faire une zone tampon qui va protéger la maison au niveau de l’isolation thermique si elle est placée plein sud. Donc il y a plusieurs éléments de réflexion dans ce projet-là.

Valérie : merci Maïlys pour cette interview et cette mine d’informations. Tous ceux qui s’intéressent à l’architecture d’intérieur peuvent aller voir ton blog Optimise mon Espace. Tous ceux qui s’intéressent à l’aménagement de terrasses, balcons et petits jardins, c’est sur mon-balcon-jardin.com. A bientôt pour le prochain podcast.

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